Pourquoi préférer une relique à la beauté d'un instrument neuf ? Le fender custom shop de Fender, l'atelier du fabricant, nous propose des instruments hyper travaillés et singularisés. Se présentant comme la reconstitution la plus fidèle de l'instrument d'époque décliné en version millésimé 54, 59,61. Bénéficiant d'une finition relic ou hyper relic c'est-à-dire avec les traces visibles du temps d'une usure radicale sur l'instrument emblématique. Le vernis estompé par le jeu de l'instrumentiste d'emblée témoigne d'une vie passée sur des scènes oubliées. Une vision crépusculaire et la nostalgie d'une autre époque nous étreint d'emblée. La vénérable relique entre les mains, nous subissons un deuxième choc, celui de la qualité de l'instrument, de sa vie propre. Qualité hors pair de la finition, la lutherie impeccablement soignée, l'électronique et sa sonorité antique retrouvée. Plus on joue, plus l'instrument nous semble avoir été joué dans une autre vie. Plus le fantôme du musicien disparu nous rappelle que la qualité d'un instrument consiste dans son vieillissement, qu'il ait été joué, surjoué, usé jusqu'à la corde. Ici une vérité se révèle : le vieillissement est artificiel ! Le bois est « torréfié ». Rien de plus récent donc. L'antiquité est une illusion. Sa vérité est de nous avoir amené de manière anticipé à ce que serait notre instrument s'il était vieilli prématurément, rodé, bonifié et amené à sa plus haute expression. Il n'a pas la beauté et le lustre de sa modernité, de sa jeunesse. Il trouve ce qui intéresse le plus l'instrumentiste, sa justesse, sa vie, sa chaleur. Ce que nous ne pourrions avoir d'un instrument neuf, parfait et esthétiquement abouti. Cette usure du temps nous apporte l'expressivité la plus haute et l’élément fusionnel avec l'instrument. Le vrai prix de la relique !
Philippe Escudier - 2025